Dans le cadre de la série des rencontres-débats autour des
Policy Papers, le centre Menassat a organisé en date du 28 Juin courant au
Campanile Casablanca, une activité sous le thème : Femmes, Libertés
Individuelles et Changements sociaux, cas d’étude : « Interdire l’accès des
femmes aux hôtels sis au même lieu de leur résidence ». Le Policy Paper en
question a été présenté par la lauréate du programme JIL Fatima Mernissi,
Halima Oulmaati, qui a co-réalisé le billet avec Zakaria Bouhera et Rachid
Zaafarane, à l’issue du même programme.
L’événement a connu la présence effective de Fatima Zahra
Chaoui, avocate et présidente de l’Association Marocaine de Lutte contre
les Violences faites aux Femmes (AMVEF), en tant que discutante du billet,
ainsi que Mohammed Abdelouahab Rafiqi, conseiller auprès du Ministère de la
Justice et chercheur dans la pensée islamique. L’activité a été modérée par
Fatima Ika, chargée de projets au sein du centre Menassat, et a connu la
présence de plusieurs acteurs de la société civile, associative et
institutionnelle, ainsi que des académiciens et des chercheurs intéressés par
la question des droits des femmes et des humains.
L’activité a porté sur la question concernant
l’interdiction de l’accès des femmes aux hôtels sis au même lieu de leur
résidence, au même titre que les hommes, ce qui signifie une atteinte
outrageuse à leurs droits fondamentaux et à leur liberté
individuelle. Selon Halima Oulmaati, ce phénomène à l’image d’une
coutume, ne dispose d’ aucune référence légale ou religieuse, ce qui se
contredit en fond et en forme avec les principes de l’égalité et ceux des
droits des humains, pourtant dûment ratifiés par le Royaume dans plusieurs
chartes internationales. L’oratrice a insisté sur l’importance de mettre fin à
ce phénomène, et a proposé en l’occurrence plusieurs recommandations dont
essentiellement, des sanctions répressives pour les contrevenants,
et des campagnes de sensibilisation autour des droits des femmes.
Dans le même contexte, l'avocate et présidente de
l'Association marocaine de lutte contre les violences faites aux femmes
(AMVEF), Mme Fatima Zahra Chaoui, a souligné combien même il était judicieux de
contrecarrer ce phénomène en raison de ses implications dangereuses, et ses
retombées sociales et socioéconomiques sur les femmes et sur la société,
surtout en l'absence de référence juridique qui le justifie. Selon l’oratrice,
cette pratique porte atteinte à la dignité des femmes et contribue
à la domination de la présence masculine dans l’espace public, qui
connaît encore et toujours un effacement manifeste des femmes de cet espace.
Sous le même angle, le conseiller auprès du ministère de la
Justice, M. Mohamed Abdelouhab Rafiqi, a souligné l'importance de ce billet
scientifique, qui dévoile la gravité d’une pratique n’ayant aucune référence
juridique ou religieuse. L'orateur a estimé que l'origine de cette pratique émane
de certaines forces de l'ordre qui recherchent des failles pour
contourner la loi. De son côté, Rafiqi a également confirmé que cette
interdiction ne repose sur aucune référence juridique, surtout à la lumière des
dernières déclarations du ministre de la Justice, qui a nié en fond et en forme
l'existence d’une note officielle donnant aux hôteliers le droit d’interdire
l’accès des femmes aux hôtels sis au même lieu de leur résidence.
De surcroît, ajoute Rafiqi, ce phénomène n’a non plus aucune
référence légale. A cette issue, il estime que la référence au Coran en termes
de législation, est susceptible de soulever des problèmes souvent liés aux
méthodes d’interprétation, dont il faut impérativement prendre égard. C'est
pourquoi, estime l’intervenant « tout ce qui touche à l'aspect législatif
doit être placé dans son contexte culturel et social ».
Pour rappel, le Policy Paper sujet de la rencontre débat a
été réalisé à l’issue du programme JIL Fatima Mernissi pour la saison
2023-2024. La thématique débattue est puisée de la recherche quantitative
nationale « Femmes, Espace Public et Libertés Individuelles » qui a été
réalisée par le Centre Menassat dans le cadre du programme JIL dans sa 3ème
version. Ce programme vise à former et renforcer les capacités des jeunes
chercheurs dans le domaine des sciences humaines et sociales. Il vise aussi
leur initiation à la rédaction des Policy Papers, notamment à travers
l’acquisition des techniques du plaidoyer de par les meilleurs experts au
Maroc. L’objectif ultime, est de pouvoir ériger des ponts entre l’académicien
et l’acteur institutionnel, en mettant à leur disposition un produit
scientifique. L’enjeu est aussi de dialoguer avec les acteurs
toutes catégories confondues afin de prendre part aux décisions autour des
politiques publiques, en adoptant un discours soft et rationnel, orienté
vers tout ce qui contribue au développement de la société marocaine.