
Menassat a mené une étude qui a porté sur « La Presse Ecrite Au Maroc et La Crise du Covid ». La recherche a couvert 96 numéros produits par des institutions médiatiques lors du confinement sanitaire au Maroc suite à la pandémie du COVID 19. L’étude s’est étalée sur trois mois couvrant la période du confinement entre Mars et Juin 2020. L’étude a eu comme questions de départ : Comment est-ce que les supports de la presse partisane et la presse non partisane ont réagi face à la pandémie du Covid-19 ? Quels discours ont-ils produit à l’égard des institutions ? Dans quelle mesures la crise sanitaire et l’état d’urgence ont-ils influé sur la liberté de l’expression ?
Pour répondre à cette question, il fallait analyser le contenu de six journaux de la presse partisane (AL Itihad Al Ichtiraki, Bayan Al Yaoum, Al Âlam) et trois supports de la presse non partisane (Akhbar Al Yaoum, Al Ahdath Al Maghribiya, Al Massae).
L’échantillon a été choisi de manière aléatoire. Deux numéros en début de mois, deux au milieu, et deux numéros vers la fin du mois de la période Mars/Avril 2020.
La technique de recherche a reposé sur « Une grille d’analyse du contenu » afin de déceler les caractéristiques et les orientations du discours produits par ces supports médiatiques. Pour compléter la recherche quinze journalistes ayant travaillés pendant la période du confinement dans un support de la presse écrite ont été interviewés. Il s’agissait de saisir le sens donné par le journaliste, en tant qu’acteur à la période de la crise sanitaire. Tout en insistant sur la dimension du genre. Ceci nous permettra de comprendre l’incidence de la pandémie sur le journaliste et sa marge de liberté. Et comment ce journaliste a vécu cette phase transitoire de la presse écrite vers la presse électronique.
Résultats de la recherche et Analyse
La crise sanitaire a représenté un danger réel pour les institutions de la presse et les acteurs médiatiques à la fois.
L’étude a démontré l’absence d’une stratégie préalablement conçue par l’institution médiatique, dans le but d’assurer la couverture médiatique de la pandémie.
La presse écrite a vécu une transition vers la presse électronique. Malgré toutes les entraves logistiques et financières qui se sont imposées, il fallait assurer la couverture médiatique.
La pandémie a suscité un grand nombre d’interrogations chez le journaliste, autour de son identité et de ses rôles dans la gestion des crises.
La pandémie et l’état d’urgence ont permis aux journalistes de vivre l’expérience inédite de la presse électronique.
La recherche a décelé une (quasi) absence totale de l’approche genre dans les contenus et les titres des journaux
L’étude a mis le doigt sur la fragilité socioprofessionnelle du corps médiatique. Ils vivent une crainte constante face à leur situation, dans un manque des outils de travail, et avec une absence de stratégies préconçues pour la gestion des crises.
Une faible représentativité genrée
On remarque que les contenus de la presse partisane liés au Covid 19, n’avait aucune orientation vers un genre social précis. Il n’était clair qu’avec un taux de 4% pour le sexe masculin, et 2.38% pour le sexe féminin. Alors que 90% du reste des contenus, n’ont aucune orientation précise, ils sont censés être orientés vers les deux sexes.
La même remarque est faite pour les pages de la « UNE », les Edito. Aucune orientation pour les sexes n’a été décelée dans ces contenus.
En ce qui est de la presse non partisane, on remarque une légère différence avec la presse partisane. Les produits médiatiques sont orientés vers le sexe masculin avec un taux de 3% et 13.49%. Et ce taux n’a pas dépassé le cap de 6.45% pour les femmes. Ce qui signifie que 90% des contenus sont orientés vers les deux sexes.
En ce qui concerne les articles de la « UNE » et les Edito, 16% sont consacrés pour les hommes et 4% uniquement pour les femmes. Or que 80% de ces contenus n’ont aucune orientation précise, ni pour le sexe masculin, ni pour le sexe féminin.
La faible représentativité de l’approche genre dans les contenus médiatiques en période de Covid était faiblement visible dans la presse non partisane.
La problématique de représentativité du genre n’est pas exclusive aux circonstances de la pandémie. Elle se pose en circonstances ordinaires ce qui suppose une recherche à part entière avec plusieurs hypothèses à développer.
Couverture médiatique en période du Covid : Présence masculine dominante
Les résultats ont démontré une égalité entre la presse partisane et la presse non partisane dans la production de contenus qui ne marquent pas la présence du genre social. 98% des contenus orientés vers les lecteurs ne font pas de distinction du genre biologique. 2% de ces contenus sont directement orientés vers des femmes. Ce qui signifie que la majorité de ces produits ne sont pas sexués. Mais si on interpelle l’approche du « féminisme », on peut dire que le taux de 2% demeure assez faible, devant la forte représentativité du genre masculin.
Mis à part ces deux postulats, il est légitime de s’interroger sur la faible présence de la femme en tant que sujet dans les supports médiatiques, mais aussi pour sa faible présence en tant que productrice des contenus, surtout si on prend en considération le taux de 0% de la contribution des femmes journalistes dans les éditoriaux, les colonnes fixes, et les colonnes d’opinion sur les pages de la UNE.
Conclusion
Malgré l’importance des résultats dépouillés, ces derniers restent relatifs, liés à une certaine subjectivité du chercheur, surtout face à un sujet délicat qui allie l’objectivité et la subjectivité à la fois.
La recherche nous a permis de déceler que la pandémie a représenté un danger sur les citoyens et sur les institutions. Elle a aussi démontré que la presse écrite en tant qu’institution médiatique a été au-devant de la scène. Elle demeure un support médiatique qui jouit d’une certaine notoriété et confiance. Les supports de la presse écrite et malgré la concurrence, ont fait la couverture en premières lignes de toute l’actualité liée au Covid 19 avec un taux de 50%.
Que la presse écrite soit partisane ou non partisane, cette variable ne change pas considérablement la position de la femme qui est faiblement représentée.
Le secteur médiatique demeure un champ masculin par excellence, surtout au vu des positions occupées par les hommes. Ils sont des rédacteurs en chef, ils sont les directeurs de rédaction, ils sont les détenteurs de contenus des éditoriaux, des colonnes fixes, et des pages de la UNE.
La situation de la femme dans les supports médiatiques reste fragilisée par des contraintes institutionnelles et structurelles, ce qui accroît ses soucis professionnels.
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